ACTU


SARAJEVO DANS LE COEUR DE PARIS
RETOUR A LA GALERIE


 

Installé à Paris depuis 12 ans, je me suis toujours efforcé, dans mon travail photographique, de donner une autre image de Sarajevo, la ville où j’ai passé plus de 30 ans de mon existence et dont j’ai été, pendant de nombreuses années, le chroniqueur visuel. La série de photographies que je présente aujourd’hui s’inscrit dans la continuité de cet effort.

Sarajevo et ses habitants sont surtout devenus familiers au public français dans les années 1990 lors de la guerre qui a ravagé l’ex-Yougoslavie pendant plus de quatre ans. Les images de souffrance se sont imposées d’elles-mêmes, et depuis, elles sont restées figées dans l’esprit de beaucoup. Rares sont ceux qui ont essayé de porter un autre regard sur cette ville et de faire partager aux gens d’ici une réalité bien plus complexe que celle que les médias ont laissé voir.

Le projet « Sarajevo dans le cœur de Paris » a longtemps mûri en moi. Dès le début, je savais qu’il ne pouvait pas être réalisé sans la participation de ceux et de celles qui ont fait partie de cette ville pendant de longues années et qui se trouvent aujourd’hui à Paris, certains par choix, d’autres par hasard.

A partir de là, l’idée de photographier l’objet que chacun de ces anciens habitants de Sarajevo porte dans son cœur s’est presque imposée d’elle-même.

Qu’y a-t-il de plus intime, de plus cher pour un être humain qu’un objet qu’il a hérité ou qu’il a acquis lui-même et qui lui rappelle son passé, la ville où il a grandi, sa famille, un moment inoubliable de son existence ?

Moulin à café, version ottomane ou austro-hongroise, chaussures d’enfant, premier jouet en bois, boîte à bijoux héritée de la grand-mère, photos de famille, mallette, petit coussin, plaque d’immatriculation, gants, pipe, livre d’or scolaire, porte-clés fétiche, figurent parmi les objets photographiés.

L’approbation générale de tous les gens que j’ai contactés m’avait encore plus conforté dans l’idée de réaliser ce vaste projet dont le but est de démontrer, à travers l’objet et l’histoire personnels de chacun, toute la richesse d’une petite ville moderne et multiethnique qu’était Sarajevo.

Je m’étais d’abord fixé l’objectif de cinquante photos maximum accompagnées d’un petit texte rédigé par chacun des participants. Mais très vite, je me suis rendu compte que l’histoire de Sarajevo ne pouvait pas se résumer en ces quelques dizaines de photos. J’ai donc continué et aujourd’hui j’ai plus de cent photos réalisées. Je poursuis ce projet tant qu’il y aura des gens qui auront des choses à dire, et qui sauront, avec leur objet personnel, apporter leur pierre à cet édifice photographique que je souhaite voir grandir.

C’est également mon histoire, celle que je voudrais partager avec ceux qui n’ont pas eu la chance de connaître Sarajevo d’avant la guerre. C’est une histoire intime, la mienne et celle de tous ceux qui se sont donnés le mal de m’accompagner dans cette volonté de faire changer le regard sur nous-mêmes.

Milomir Kovacevic